Soul of London – Gaelle Perrin-Guillet

Gaslamp : [gæzlæmp] / littérature de fantaisie caractérisée par un ancrage spatio-temporel dans l’Angleterre de l’époque victorienne.

Soul of London par Perrin-Guillet

Si le genre, très prisé au XIXème – et accessoirement ancêtre du steampunk- est surtout le fait d’auteurs anglo-saxons, il est devenu plus rare de trouver un roman contemporain français pur jus auréolé de la lumière particulière des becs de gaz londoniens.

Soul of London est de ceux-là.

Fidèle à l’ambiance des romans policiers victoriens, gothique et glauque, habités par une humanité grouillante, traînant ses haillons dans les bas quartiers de l’East end, ce roman – que l’on devine porteur d’une série à venir – met en scène un coule d’enquêteurs originaux et pourtant ancrés dans la lignée des duos improbables. L’infirme et l’enfant.

Cela sonne comme une allégorie victorienne : l’expérience instruisant l’innocence, la jeunesse soutenant la vieillesse… à moins que l’inspecteur Henry Wilkes, boiteux et exilé aux affaires de chiens écrasés – pardon, décapités- ne soit le symbole déséquilibré d’une police désabusée et en perte de vitesse après l’échec cuisant infligé par Jack l’Éventreur.

Tel Vulcain, dieu des boiteux, en sa forge souterraine, Wilkes, aidé du jeune orphelin Billy arpente les basfonds de Londres à la recherche de la vérité, quitte à bousculer quelques âmes au passage – pour mieux sauver la sienne ?

Suivant la structure classique du whodunit, les indices semés au fil des pages par l’auteur en embuscade, servent une résolution de l’énigme toute en déductions psychologiques, loin des sentiers sanglants et des retournements dramatiques des thrillers contemporains. Une exquise délicatesse so british. Elémentaire…

Une délicatesse que ne démentirait pas le fantôme de Sherlock Holmes, omniprésent et toutefois saupoudré au fil des pages en touches légères, tels les flocons de neige qui peu à peu s’accumulent sur Londres au fil de l’enquête de Wilkes, jusqu’au dénouement, recouvrant les rues de la ville comme un manteau de pureté évidente. La victoire de la blancheur innocente ou la rédemption de Londres ?

Car ne nous y trompons pas, le personnage principal de Soul of London reste bel et bien Londres, comme l’annonce d’emblée la magnifique couverture de Bertrand B.

Londres victime ou bourreau qui subit la pesée de ses âmes, ville inhumaine et froide, capable d’engendrer les pires monstres et les meilleurs enquêteurs, ville en recherche d’équilibre en cette fin de XIXème siècle, scène de tous les fantasmes et de tous les possibles.

Londres comme une fleur sauvage.


Gaëlle Perrin-Guillet Née en 1975, Gaëlle Perrin-Guillet auto-publie deux romans (Le sourire du diable et Au fil des morts) avant de participer à deux recueils des Auteurs du noir face à la différence (éditions JIGAL et L’atelier Mosesu). Viendra Haut-le-Choeur, publié aux Éditions Rouge Sang, qui obtint le Prix du Polar 2014 Dora Suarez.

Soul of London est sa première publication chez Fleur Sauvage.