Scents of Orient – Marianne Stern

Résumé :

1916, Surat, Raj britannique
Le gouverneur Lord Nelson mène depuis cinq ans les affaires de la British East India d’une main de maître, quand il reçoit une nuit la visite du capitaine Clive. La Couronne britannique est à la recherche d’une vieille connaissance du gouverneur, un Allemand du nom de Herr Maxwell, et Clive pense que Nelson possède des informations susceptibles de le trouver.
Dès lors, Surat se change en nid d’intrigues. Très vite, il apparaît que les Anglais ne sont pas les seuls sur les traces de l’Allemand : la tyrannique duchesse Elzebeth, ainsi que ce séduisant Français sont eux-aussi derrière lui. Nelson se croyait en-dehors de ces histoires, jusqu’au jour où Maxwell en personne le contacte, pour lui demander de l’aide.
Entre complots, aérostats, orfèvrerie et gros diamants, la petite existence tranquille de Lord Nelson s’apprête à être complètement bouleversée…

Scents of Orient, Marianne Stern, Editions Le Chat Noir, Collection Black Steam
ISBN : 9782375680278

Notre avis :

Bienvenue dans les colonies britanniques !

A l’opposé d’autres écrivains steampunk qui situent leur action à Londres ou Paris, Marianne Stern a cette particularité de nous faire voyager en réinventant les codes, ce qui est très rafraîchissant.

Dans son premier opus : Smog of Germania, l’action se situait dans un empire allemand ultra-pollué et en pleine décrépitude, gouverné par un fou. Dans Scent of Orient, deuxième tome de la saga, nous retrouvons Herr Maxwell, dix ans après, mais dans les colonies britanniques indiennes sur fonds lointain de guerres incessantes entre France, Angleterre et Allemagne.

Au brouillard noir et glacé de Germania, succède  la chaleur moite et tropicale de Surat, son fourmillement humain, ses comptoirs marchands, ses habitants considérés comme des sous-hommes par les colons.

La description des paysages désertiques à l’opposé du surpeuplement des villes indiennes nous plonge avec justesse dans une ambiance de colonie britannique de la fin du XIXème siècle.

Cependant, quelques détails nous interpellent afin de nous rappeler le côté steampunk de cette histoire : les automates presque vivants crées par Maxwell et surtout… les aéronefs ! Deux sujets d’importance que l’on retrouve aussi dans Smog of Germania.

En effet, Surat abrite un port aérien assez vaste et ultra-contrôlé. Par ailleurs, plusieurs combats d’aéronefs viennent jalonner cette histoire, s’apparentant à des combats navaux. Du Nodule, vaisseau-insecte de Bellecourt, en passant par le très voyant vaisseau de Lord Nelson ou la vipère, l’aéronef en forme de serpent de Elzebeth, le roman fait la part belle aux dirigeables et autres zeppelins avec des descriptions mêlant détails techniques et lignes oniriques.

A côté des grosses machines, les automates de Maxwell tirent également leur épingle du jeu en prenant l’apparence d’animaux ou de plantes plus vraies que nature mais avec un côté maléfique. Ainsi, l’on verra un corbeau, des tournesols, des abeilles ou encore des chauve-souris tueuses.

Mais pourquoi tant de haine ? Tout simplement parce que ce cher Herr Maxwell, né orfèvre (sous entendu, un don de naissance rare lui donnant les connaissances pour créer n’importe quelle machine) infuse dans chacune de ses créations un peu de son âme. Très réceptif aux énergies positives et négatives qui l’entourent, il sait les mettre à profit pour intriguer et convaincre. Malheureusement, son don est aussi une malédiction : ne créant que pour tuer, ses créations gardent uniquement le côté maléfique de lui-même et il est recherché par toutes les forces militaires pour servir les intérêts des uns contre les autres.

Une intrigue (amoureuse) centrée sur les hommes

Autant Smog of Germania avait pour personnage principal la princesse Viktoria et son histoire d’amour avec l’homme-machine Jeremiah, autant ce sont les hommes qui sont au coeur de cette nouvelle intrigue.

Marianne Stern n’a pas son pareil pour décrire les relations amoureuses masculines avec subtilité et sincérité. A côté de l’histoire d’amour entre Maxwell et Martin Sieger, Lord Nelson et Bellecourt, les parties fines de l’espionne Elzebeth semblent mortifères. Le seul personnage féminin ayant un rôle d’importance s’avère être une garce assassine, obsédée par son image et le pouvoir qu’elle peut avoir sur les autres.
Lord Nelson, tout précieux qu’il soit dans son apparence colorée et son attitude extravagante, s’avère plus attachant. Il s’apparente presque à un hobbit découvrant le monde extérieur à Surat pour la première fois et prenant part à des intrigues qui le dépassent. Sa liaison avec Bellecourt est contrariée par son attachement sans retour à Maxwell.
Bellecourt, espion et agent double, fin charmeur et amant jaloux, fatigué d’être toujours en cavale, espère que cette mission sera la dernière et qu’il pourra enfin prendre sa retraite un jour avec peut-être un compagnon à ses côtés. Il voit en Lord Nelson d’abord une source d’information puis un possible compagnon.
Maxwell, dépossédé de son précieux vaisseau et de son équipage recherche encore son livre de bord, objet de toutes les convoitises, afin de recommencer une nouvelle vie. Il utilise ses charmes pour convaincre Nelson de l’aider mais reste fidèle au frêle Martin Sieger, second de son vaisseau de surcroît.
Les amours masculines ne sont pas simples car présentés comme teintés de jalousie et de pulsions animales. Cependant, la sincérité est de mise à l’opposé de toutes les liaisons calculées d’Elzebeth.

Vers un troisième opus ? (ATTENTION SPOILERS)

A la fin de Smog of Germania, Maxwell et son frère s’étaient envolés à nouveau vers la piraterie. Cette fois-ci, l’on découvre un Maxwell seul. Que s’est-il passé depuis 10 ans?
L’aventure que l’on aura suivi aura servi à retrouver le livre de bord de Maxwell pour qu’il puisse conserver ses secrets de créateur. Mais était-ce vraiment aussi simple ?
Chaque personnage a ses propres motivations et les sous-intrigues tendent à complexifier l’histoire principale.
Ce roman nous laisse donc…sur notre faim ! Une fois dévoilée l’identité du véritable employeur de Beauville et des raisons qui l’ont poussé à retrouver Maxwell, on ne sait pas ce que devient Maxwell et pourquoi il se sent trahi.
Tout ceci laisse présager une suite. Peut-être que Marianne Stern nous emmènera dans une autre contrée?

En conclusion :

Un roman d’espionnage steampunk intelligent qui ravira les amateurs de mécanique autant que les aventuriers sans peur.