Rue Farfadet – Raphaël Albert

Résumé :

Panam, dans les années 1880 : les humains ont repris depuis longtemps la main sur les Peuples Anciens. Sylvo Sylvain a posé son havresac dans la rue Farfadet, gouailleuse à souhait. Chapeau melon vissé sur le crâne, clope au bec, en compagnie de son fidèle ami Pixel, il exerce la profession exaltante de détective privé et les affaires sont nombreuses ! Des adultères à photographier, des maris jaloux, des femmes trompées, etc. Ni très rémunérateur, ni très glorieux que tout ceci. Alors, Sylvo fréquente assidûment les bars, les cafés et les lieux de plaisir en tout genre où son charme envoûte ces dames…
Jusqu’au jour où, lors d’une banale enquête de routine, il se trouve mêlé à une machination dépassant l’entendement. Le voilà, bien malgré lui, chargé de l’affaire par l’un des trois puissants ducs de Panam. Saura-t-il tirer son épingle de ce jeu compliqué et dangereux ?

Dans ce premier roman Raphaël Albert déploie un art consommé de l’écriture. Il nous fait palpiter au rythme d’une histoire passionnante de bout en bout. Il trousse avec style un personnage attachant et original et invente un univers surprenant de fantasy steampunk où l’on croise centaures taxis, motos à vapeur et magie de bataille.

 
Aurelien Police

Notre avis :

Avec ce premier roman, Raphaël Albert nous fait découvrir avec délices les détails d’une ville-monde baptisée « Panam ». C’est tout le Paris de la belle époque qui a été recyclé, retravaillé par l’auteur pour en faire une capitale jumelle dans un monde fantastique peuplé d’êtres féeriques. Nains, elfes (quoi que peu nombreux), orques et gobelins vivent eux aussi dans un Paris alternatif où existe la magie. Les quartiers et boulevards de Panam ont eux aussi été intelligemment renommés à la sauce fantastique ; le lecteur s’amusera à décoder ce jeu de piste, entre le « Boulevard Ossement » et le « Bois des vingt reines ». Pas de république, non : le Royaume est dirigé par les Grands Ducs, une sorte de Triumvirat où les magouilles politiques semblent être une affaire du quotidien. Au fur et à mesure que l’on parcourt les rues, on découvre avec plaisir des quartiers populaires peuplés de « titis panamiens », mais on trouvera aussi des trafiquants en tout genre, des gamins des rues et des bourgeois mondains. Le tout, dans une ambiance de paranoïa générale causée par des attentats de terroristes anarchistes. Et bien sur, Sylvo Sylvain et son ami Pixel vont se retrouver mêlés à tout ça … Un univers qui se montre donc parfaitement crédible, mais pour lequel on regrettera le jusqu’au-boutisme de l’auteur qui a réinventé tout un calendrier (mois, jours de la semaines et heures) qui vient complexifier la lecture et n’apporte rien au récit.
Le personnage principal, Sylvo est un détective privé un brin alcoolique, souvent taciturne et constamment cynique. Cet anti-héros est néanmoins particulièrement charismatique puisqu’il est un des deux seuls elfes présents dans Panam ; et son passé hors de la ville reste un mystère qui intriguera longtemps le lecteur. Sylvo n’aime pas les flics, Sylvo n’aime pas la vie, Sylvo passe son temps à picoler en résolvant des affaires d’adultères. On vous le dit : ça n’est pas un héros, ou alors contre son grès [on s’arrêtera là pour ne pas spoiler]. Bref, c’est un détective comme on les aime. Les personnages secondaires Pixel le Pillywiggin et le journaliste Albert Londres sont eux aussi très bien ficelés, sans parler des flics (raclures !) et des bandits (escrocs !) qui viennent parfaitement peupler ce paysage de polar parisien.
Concernant la plume de Raphaël Albert, on peut dire que c’est un premier roman bien travaillé. Le récit est écrit à la première personne, ce qui permet à la fois de rendre le personnage principal plus attachant et l’univers plus tangible. Le vocabulaire employé, l’humour (parfois très noir) et les quelques fausses coupures de journaux rendent le tout très convaincant : on croirait lire un roman d’époque.

Pour finir, le récit. L’auteur reprend les codes des polars et des vieux romans de gares pour écrire une enquête de routine qui ne se déroule pas comme prévu, avec en arrière plan des instabilités politiques et des attentats meurtriers. C’est somme toute classique, mais ça fonctionne bien. Cependant, on constate certaines longueurs, et on peine parfois à être convaincu par les scènes d’actions. Fort heureusement, le récit est relativement court, du moins assez pour que le lecteur n’ait pas le temps de s’ennuyer ; on dévorera le bouquin accompagné d’une sauce de cynisme saupoudrée d’humour. Un premier roman certes introductif et imparfait, mais qui laisse présager la naissance d’une série absolument incontournable pour les fans de steampunk.

Extrait : « Evidemment, elle était moins belle avec une balle dans le front« 

existe en grand format et en poche (collection Hélios) chez Mnemos.

Suite des extraordinaires et fantastiques aventures de Sylvo Sylvain, détective privé :

– Avant le déluge , 2011
– Confessions d’un elfe fumeur de lotus, 2014

A lire aussi, pour les amateurs de Steam-Fantasy :

– Les enchantements d’Ambremer, de Pierre Pevel (pour le côté feuilletonant et la description magique d’un Paris alternatif de la Belle Epoque)
– A vos souhaits, de Fabrice Colin (pour la réutilisation des codes de la Fantasy dans un univers steampunk extrêmement comique)

Pour approfondir :

– Suivez la page de Sylvo Sylvain sur « visage-livre »
– participer prochainement au concours de FSP pour gagner le troisième livre de la série, fraîchement sorti de chez l’imprimeur. (Re)lisez vite les deux premiers tomes !