Suite à la sortie des confessions d’un elfe fumeur de lotus, troisième tome de la série de steam-fantasy Sylvo Sylvain, de Raphaël Albert, publié chez Mnémos, Lord Orkan von Deck s’est empressé de contacter l’auteur pour lui poser tout plein de questions. Si vous n’avez pas encore dévoré ses livres, cette interview devrait vous convaincre de le faire.
FSP : Bonjour Raphaël Albert, tout d’abord, pourrais tu te présenter à nos lecteurs ?
R.A : Raphaël ALBERT est né le 18 novembre 1972, d’un couple d’humains augmentés Bidouble. Son père état capable de rire et de pleurer simultanément, sa mère avait deux cœurs, l’un pour aimer, l’autre pour haïr. A 13 ans, ses parents, lassés de lui, l’envoie travailler dans les mines de chewing-gum d’Aspartame-8. Il s’initie à l’art de la bulle géante et devient vice-champion galactique de bulle de gomme, catégorie Ruminants de moins de vingt dents. Malheureusement, la mastication intensive de bubble gum ruine sa dentition et son système digestif. Lorsqu’il quitte les mines de gomme à mâcher, à 16 ans, il n’est plus qu’une ombre d’homme. Constatant qu’il n’est plus qu’un cadavre ambulant, Raphaël, jeune homme déjà plein de ressources et d’allant, décide d’assurer son avenir spirituel et sa carrière dans l’au-delà. Coup sur coup, il se convertit au catholicisme, au protestantisme, à la dianétique, au vaudou et au culte de Chuck Norris. Dans chacune de ces Eglises, il brille par son zèle et une promotion météoritique qui l’amène aux plus hautes fonctions avant le reniement de sa foi et sa conversion à un nouveau dogme. Après avoir obtenu ainsi la rémission totale et définitive de l’ensemble de ses péchés, Raphaël a la surprise de bénéficier également d’une rémission de la maladie qui le ronge, suite à une nuit entière de fou-rire à la lecture du bottin schtroumpf 2015. Dans la foulée, il se convertit au Thinking et se lance à corps perdu, homme de contraste, dans une débauche de sexe, de drogue et de profiteroles. Conséquence inattendue d’une rave party à base de biniou et d’orgue cardiaque, il accouche de trois rejetons de Yog-Sothoth qu’il affuble de noms barbares : Léopold, Zoé et Philomène.
A 36 ans, il fait la rencontre du troisième type qui bouleverse son existence. Elle s’appelle Selline et c’est une Vénusienne de type X, la plus puissante des entités de son espèce répertoriée à ce jour. Enlevé à l’insu de son plein gré, subissant moult expériences de laboratoire en tant que cobaye volontaire désigné d’office, il finit par se greffer un second coeur et jurer fidélité aux trois Engeances Blondes Ectoplasmiques pondues par la Vénusienne lors du passage de la Comète Floue, et auxquelles elle donne des noms aux consonnances étranges issues de son dialecte vermiculaire : Maxime, Valentin et Samson. Depuis, Raphaël Albert a été aperçu se livrant à des jeux érotiques en apesanteur du côté des anneaux de sa turne, à vandaliser le jardin des Hespérides, à s’enivrer de poésie, d’hydromel et de flatulences de Bulgrozistes zorglondés, à visiter les quatre testicules du Dragon Céleste et à pêcher des poissons-scud dans les profondeurs du néant cromiste. D’après nos informateurs, l’an dernier, il rôdait dans les faubourgs du Grand Ordinateur, et il avait subi une opération des six bras pour devenir rédacteur des ébats. On l’a perdu de vue après cela. La dernière fois qu’il a été signalé, c’est par un pirate quantique qui jure l’avoir aperçu avec sa Vénusienne, ses trois rejetons de Yog-Sothoth et ses trois Engeances Blondes Ectoplasmiques, en route pour le mythique Réservoir de Jubilation à bord d’une vieille fusée Station Wagon. Le pirate prétend que les six lardons de Raphaël et Selline lui auraient fait des grimaces par le hublot arrière de la fusée, mais rien n’est certain.
FSP : Pourrais tu expliquer à celles et ceux qui ne les connaissent pas encore, ce que racontent les extraordinaires et fantastiques enquêtes de Sylvo Sylvain ?
R.A : Je pourrais, si je le voulais. Nan mais lisez-les et puis c’est tout ! C’est l’histoire d’un sale elfe herbivore qui fait rien que des bêtises et qui se fait virer de sa forêt natale pour aboutir dans une Panam steampunk et fantasy où il devient détective privé. Là, il fréquente des prostituées (oh !), boit de l »absinthe (oh!) et attend la fin des temps. Il lui arrive des tas d’aventures aventureuses qu’il raconte lui-même dans un style fleuri. Voilà. Je crois que j’ai rien oublié.
FSP : Comment ces trois romans se sont-ils construits ? Quel a été ton cheminement entre l’idée, l’écriture, et la publication ? Quel a été le rôle de ton éditeur, Mnémos, dans la construction de cette série ?
R.A : Ils se sont construits à la sueur de mon front brûlant d’un fièvre créatrice. Lentement, trop lentement, et sans aucune méthode. Je ne savais pas trop où j’allais (et ça se voit un peu). J’ai donc commencé à écrire sans trop d’idée préconçue, et les choses se sont mises en place peu à peu, conjointement, l’écriture générant des idées qui généraient de l’écriture. Un peu de bric et un peu de broc, donc. Et Mnémos, en la personne de Frédéric Weil (puis de Stéphanie Chabert) a enveloppé le tout d’encouragements et de suggestions éclairées qui m’ont permis de peaufiner les trois tomes pour en faire quelque chose de bien mieux que ce que c’était au premier abord. Sans être intrusifs, ils ont su pointer les faiblesses de rythme ou de style et m’ont donc permis d’améliorer (parfois un peu, souvent beaucoup) mes trois petites créations.
FSP : L’univers de Sylvo Sylvain, et notamment la ville de Panam, est un subtile mélange d’uchronie steampunk et de Fantasy. Comment as tu construit cet environnement, quelles ont été tes principales références, et comment as-tu dosé ce mélange entre réalité historique de la Belle Époque et Fantastique ?
R.A : Une influence majeure : mes études d’Histoire, indispensables. Et un petit millier d’autres, qui se trouvent toutes dans mes livres (plus quelques autres qui ne sont pas des influences mais qui sont incontournables). Quant au dosage, j’ai fait comme un marmiton : à la louche et au pifomètre. Je crois que, globalement, c’est pas mal réussi.
FSP : Ton dernier roman, Confessions d’un elfe fumeur de lotus, est en quelque sorte le prequel de la série. On revient aux origines du héros (ou de l’anti-héros) pour découvrir comment il est devenu cet elfe renégat, quel crime il a commis pour être exilé. Pour toi, c’était nécessaire de raconter cela dés le troisième tome de la série ?
R.A : C’était comme ça que je souhaitais raconter l’histoire dès le départ, pour plusieurs raisons. D’abord, mon Panam aurait fini par lasser et s’épuiser de lui-même. Déjà, au deuxième tome, le charme de la découverte n’y est plus, au troisième, on risque de s’ennuyer. Alors qu’un bon break permettra aux lecteurs de retrouver Panam dans un quatrième tome avec davantage de plaisir (je l’espère, en tout cas). Deuxième raison : je me serais lassé aussi d’écrire toujours peu ou prou la même chose… Troisième raison : j’aime bien surprendre. Quatrième raison : pour avoir plus de force, le passé de Sylvo devait être une histoire en elle-même, contée d’un trait. Bref, un roman complet. Cinquième raison : « dès le troisième tome », dis-tu? Déjà que les lecteurs trouvaient que les deux premiers tomes n’en disaient pas assez sur Sylvo… Je ne pouvais pas traîner davantage en longueur.
FSP : Tu as participé à la rédaction d’un an dans les airs, ouvrage collectif publié chez Mnémos, superbe livre ouvragé par Nicolas Fructus rendant un hommage steampunk à Jules Verne. Comment s’est déroulé cette collaboration ? Te considères tu comme un auteur du genre steampunk ? Quel regard portes tu sur ce mouvement ?
R.A Excellente collaboration. C’était drôle, nouveau, enrichissant, je re-signe à la première occasion. Non, je ne suis pas un auteur steampunk, ou fantasy, ou autre. J’aime pô les étiquettes. Enfin, pas de regard particulier sur le mouvement. Je n’en lis pas, mais j’adore croiser des fondus grimés et déguisés façon aventuriers steampunk (d’ailleurs, il y a quelques costumes dans mon tome 4 qui sont carrément steam), et il y a notamment cette compagnie bretonne (avec sa machine à générer de la brume pour se protéger du soleil dans les contrées dangereuses du sud de la Loire : merde, j’ai mangé sonnom mais tu dois connaître). J’aime beaucoup ce qu’ils font. Dans le même style, il y a aussi le cabinet mirifique du Professeur Berlupin, dont le créateur a d’ailleurs remporté mon troisième tome lors du concours que tu as organisé (et dont j’utilise la création dans mon tome 4… Bref, c’est le serpent qui se mord la queue, cette histoire !).
FSP : Pour finir, une question évidente que nos lecteurs se posent : Sylvo Sylvain aura-t’il droit à un quatrième roman ? Que nous réserves tu alors ? As tu d’autres projets ?
R.A : Donc, oui, je crois avoir laissé subtilement sous-entendre dans mes réponses précédentes qu’un quatrième tome était en préparation. Il clôturera une fois pour toutes les extraordinaire et fantastiques enquêtes, etc. Et oui, j’ai plein d’autres projets : fantastique, polar, historique, SF, je veux croquer dans tout ! (après, en ai-je le talent, c’est une autre histoire…) (tiens, une autre histoire… Et si je racontais l’histoire d’un écrivain raté qui…)
Interview réalisé par Orkan Von Deck