Léviathan sur Netflix : un steampunk épique… et une adaptation littéraire rare.

Léviathan sur Netflix

Léviathan sur Netflix est une nouvelle série animée inspirée du roman jeunesse de Scott Westerfeld paru en 2009, prix Locus du meilleur roman pour jeunes adultes de 2010. Elle transporte le spectateur dans une Première Guerre mondiale alternative peuplée de machines titanesques et de créatures génétiquement modifiées.

Cette série d’animation japonaise se distingue d’abord par la singularité de son origine : elle n’est pas tirée d’un manga ou d’un light novel japonais, mais d’un roman occidental. Une rareté dans l’univers de l’« anime » japonais.

Léviathan sur Netflix : une adaptation littéraire inédite dans le paysage de l’ « anime » japonais

S’inspirer d’un roman occidental comme source principale pour un anime est très inhabituel. 

La plupart des séries animées japonaises proviennent de mangas, ou dans une moindre mesure de light novels — ces romans illustrés japonais destinés aux jeunes adultes, comme les très célèbres Sword Art Online ou Overlord, ou encore pour évoquer un exemple Steampunk, le moins célèbre Clockwork Planet, adapté en 2017. 

Les rares adaptations animées japonaises de romans occidentaux s’attaquent plus généralement aux grands classiques de la littérature comme Gankutsuou, adaptation futuriste du Comte de Monte-Cristo ou, plus célèbres pour les natifs des années 80, le vaste projet de séries d’animes de Fuji TV, le World Masterpiece Theater qui a adapté de nombreux classiques de la littérature pour enfants tels que Heidi, Tom Sawyer, Princesse Sarah, Les Quatre filles du docteur March, Peter Pan ou encore Les Misérables pour ne citer qu’eux.

Par conséquent, en dehors de l’adaptation des classiques de la littérature occidentale qui a été foisonnante entre 1969 et 1997, l’adaptation de romans occidentaux est rare.

On pourra bien entendu citer Le Château Ambulant de Hayao Miyazaki (ayant travaillé sur plusieurs séries du WMT avant de fonder Ghibli) qui adapte en 2004 Le Château de Hurle de l’autrice anglaise Diana Wynne Jones.

En 2006, Les Contes de Terremer, réalisé par Goro Miyazaki, son fils, dont l’histoire est librement inspirée des premiers, troisièmes et quatrièmes livres du Cycle de Terremer, d’Ursula K. Le Guin, écrivaine américaine de fantasy et de science-fiction.

On aura également une pensée émue pour le film Souvenirs de Marnie, de 2014, inspiré par le roman When Marnie Was There de l’écrivaine britannique de livres pour enfants Joan G. Robinson.

Et enfin, 10ans plus tard, Kenji Kamiyama réalise Le Seigneur des Anneaux : la Guerre des Rohirrim qui, en 2024 a fait grand bruit et a clivé les fans de Tolkien.

Cependant, en dehors de ces cas très rares, si on sort du domaine de la « littérature classique » (Dumas, Hugo, Twain, etc.), et qu’on cherche plutôt des romans contemporains ou de genre (fantasy, SF, jeunesse moderne), alors Léviathan (2025) est l’un des tout premiers exemples récents et majeurs de l’animation japonaise. De plus, et cela est sûrement une première dans l’histoire de l’anime japonais, son réalisateur est français ! Christophe Ferreira réalise ainsi sa première série d’animation qui revêt un statut original dans l’histoire récente de l’animation japonaise.

Et Mesdames et Messieurs… Ladies and Gentlemen…c’est du Steampunk !

L’univers : steampunk, romance et guerre alternative

L’action se déroule dans une Première Guerre mondiale alternative, où l’on oppose deux camps : les « Clankers » (l’Axe, machines et chars) et les « Darwinistes » (les Alliés, utilisant la génétique et bio-ingénierie pour créer des créatures volantes). Le récit suit deux jeunes protagonistes : Alek, prince autrichien en fuite, et Deryn, une Écossaise travestie en garçon pour intégrer l’aviation britannique. Leur relation, entre amitié et tension amoureuse, est au cœur d’un récit qui nous faire voir du pays, allant de l’Autriche à New-York en passant par Istanbul.

Le design visuel joue sur le mariage audacieux des machines steampunk et de l’usage fonctionnel des animaux. Les machines — un gigantesque cachalot volant, des dirigeables, des bêtes génétiquement modifiées, ou des sous-marins gigantesques amphibies à la forme d’un crabe — évoquent de bien des manières un mélange de cuivre et de biologie (rappelant parfois les Machines de l’Île de Nantes qui pourrait avoir été une inspiration sachant le réalisateur français). Les Walkers des Clankers m’ont particulièrement plu. Rappelant les « mecha » de Goldorak, Gundam ou Evangelion, ces machines anthropomorphiques, analogiques et mécaniques sont plus modestes, plus archaïques, mais font tout le charme des innovations Steampunk.

La machine éléphant – île de Nantes. © istock / :saiko3p)

La musique, quant à elle, signée par Kazuma Jinnouchi, Nobuko Toda et surtout Joe Hisaishi (la légende de Ghibli), renforce l’atmosphère cinématographique et l’héritage de ces grands films d’animation cités précédemment.

Quelques faiblesses qui n’enlèvent rien à la qualité globale

Certaines critiques relèvent cependant des faiblesses auxquelles je pourrais me joindre : rythme inégal, potentiel narratif sous-exploité du décor de guerre, manque de profondeur dans l’écriture des conflits et peut-être un usage trop important des CGI pour animer les machines, les dirigeables et les environnements, rappelant plus l’aspect fabriqué d’un jeu vidéo que l’authenticité d’un Ghibli. Pour autant, l’univers reste accrocheur grâce à ses personnages attachants, sa mise en musique et sa fin réussie.

La fin : émotion et tension à la Star Wars

Ce que j’ai particulièrement aimé dans Léviathan, c’est sa conclusion. Les derniers épisodes montent en tension narrative et émotionnelle, évoquant chez moi des moments très comparables aux plus grandes heures de Star Wars : le conflit intérieur, la camaraderie mise à l’épreuve, les choix difficiles… une intensité dramatique qui m’a vraiment marqué, tout en soulevant les grands thèmes chers au Steampunk.

Conclusion

  • Originalité rare : adaptation directe d’un roman occidental, ce qui reste exceptionnel dans l’univers des anime.
  • Ambiance steampunk immersive : machines, bestiaires bio‑ingénieux, cocktails visuels et sonores puissants.
  • Rythme bancal et monde sous-exploité selon certains critiques.
  • Finale prenante et émotionnelle, tirant le récit vers une intensité digne des meilleures sagas interstellaires.

En somme, Léviathan brille par son audace et son originalité narrative — à découvrir pour tous ceux qui cherchent un anime hors des sentiers habituels et qui a tout pour devenir un incontournable de la sphère steampunk, à l’instar de son grand frère Steamboy.

Tudum, c’est d’ores et déjà disponible sur Netflix.